Markus Amm, né à Stuttgart en 1969 est connu pour ses peintures abstraites et ses expérimentations avec la matérialité et la lumière.
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Markus Amm, né à Stuttgart en 1969 est connu pour ses peintures abstraites et ses expérimentations avec la matérialité et la lumière. Son travail explore des processus minutieux et souvent laborieux, notamment l’application de multiples couches de vernis et de pigments, créant des surfaces vibrantes et lumineuses. Ses œuvres, à la fois minimalistes et organiques, interrogent la perception visuelle et le rapport au temps à travers des textures et des jeux de transparence. Son travail est régulièrement exposé dans des galeries et institutions internationales. Son travail a été présenté à la galerie Mezzanin à Genève.
Pouvez-vous nous décrire votre quotidien à l’atelier et la relation que vous entretenez avec cet espace?
Mon atelier se trouve dans la zone industrielle des Acacias. C’est amusant car depuis 25 ans, j’ai pour habitude de traverser des ateliers de mécanique avant d’arriver à mon studio. Il y a une très belle vue sur le Salève à droite et le Jura à gauche et les couchers de soleil y sont parfois incroyables. Je crois en cette pratique quotidienne de l’atelier. Même si je n’ai rien à y faire – ce qui heureusement arrive rarement – je lis, j’écoute de la musique, je regarde par la fenêtre. Le studio est une sorte de machine qui, à un moment donné, fonctionne automatiquement et je fais partie de cet engrenage.
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Vous êtes un artiste allemand basé à Genève mais votre travail est principalement montré à l’international : Londres, New York et dernièrement Séoul. Comment expliquez-vous cela ?
C’est dû au fait que mes galeries me tiennent très occupé ! Une autre explication pourrait être que je suis venu à Genève pour des raisons personnelles avec l’idée de repartir après deux ou trois ans. Mais vous savez comment les choses fonctionnent : chaque année, il y a une nouvelle prolongation ou une nouvelle raison pour laquelle vous ne repartez pas et vous vous rendez compte que vous êtes devenu Genevois. Aujourd’hui, j’accepte le fait que je pourrais mourir ici.
Vous considérez-vous comme un artiste genevois ?
Je me sens Genevois. Je vis ici avec ma famille et j’ai l’intention d’y rester au moins jusqu’à ce que mes enfants soient grands. Par contre, je ne me vois pas comme un artiste genevois. J’ai vécu dans trop d’endroits et de pays différents avant d’arriver à Genève. En fin de compte, je pense être un étrange mélange de différentes régions d’Europe et des États-Unis.
Que pensez-vous de la scène suisse ?
La scène suisse est incroyable ! Je dis ça sans flatterie. Un si petit pays avec autant d’artistes fantastiques. Dans la vie de tous les jours, je suis plutôt pragmatique et matérialiste et les faits sont là : je n’ai jamais vu un pays qui soutient ses artistes aussi bien et c’est clairement payant. Les autres pays devraient s’inspirer de ce que signifie ici le soutien à la culture !
Où trouvez-vous votre inspiration ? Y a-t-il des lieux ou des œuvres dans la région qui vous inspirent ?
Mon œuvre d’art préférée reste le Jet d’eau, surtout par matin de grand vent depuis les Bains des Pâquis. Ma deuxième est à La Jonction. Il suffit de regarder comment les deux cours d’eaux se mélangent et les images que cela crée. Je ne l’ai jamais fait jusqu’à présent mais depuis peu, je regarde les gens sauter directement dans l’eau au point de croisement des deux rivières et éclater de rire en passant tantôt de l’eau boueuse à l’eau turquoise et vice-versa. Il y a là quelque chose de spécial…
Quelles sont les œuvres que vous présentez à la galerie Baton à Séoul ?
J’ai toujours joué avec cette indifférence entre l’abstraction et la figuration et avec la façon dont l’esprit construit des images en fonction de sa vision personnelle. Le titre de mon exposition à Séoul était : Cats, Goats and Monsters – La Jonction. Si vous lisez ma réponse à la question précédente vous comprendrez peut-être.
Travaillez-vous en séries ou chaque œuvre est-elle individuelle ?
Techniquement, je travaille par séries. Il y a toujours environ 30 à 40 peintures sur lesquelles je travaille depuis des années. Plus je travaille longtemps sur ces tableaux, plus ces pièces deviennent des œuvres individuelles. Il arrive qu’une peinture soit terminée au bout d’un mois alors que d’autres restent accrochées pendant des années. Cela signifie que le flux naturel est interrompu à chaque exposition. Il y a toujours des œuvres très récentes qui montrent de nouveaux développements à côté de très anciennes qui viennent d’être terminées. Ces différents décalages dans la chronologie des peintures font finalement de chaque œuvre une pièce individuelle, du moins dans le cadre de l’exposition où elle est présentée. Après, de loin, on peut reconnaître des séries qui traversent les différentes expositions au fil des ans.
Sauriez-vous nous dire comment votre travail va évoluer ces prochaines années ?
J’ai déjà prévenu mes galeries qu’au cours des prochaines décennies, je pourrais bien devenir un peintre figuratif…
Quel sentiment aimeriez-vous que les gens retiennent lorsqu’ils découvrent vos œuvres ?
Pour moi, l’art est presque le seul moyen de vivre des expériences épiphaniques, le seul moyen de comprendre le monde d’une manière non rationnelle, juste par l’instinct et l’intuition. C’est surtout avec la peinture que j’y parviens, mais les œuvres conceptuelles peuvent aussi le faire. Je suis trop complexe pour demander cela aux autres. Mais être capable de partager cette expérience serait mon but.
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Vous avez notamment travaillé à la HEAD. Qu’avez-vous retenu de cette expérience d’enseignement et de transmission ?
On ne peut pas enseigner l’art. Ce que vous pouvez faire est davantage comparable à l’image d’un entraîneur : vous percevez le talent des étudiants et vous essayez de les maintenir sur la bonne voie ou, en fonction de leur développement, de les en écarter. Il faut avoir un très bon sens de la psychologie. Il y a beaucoup à laisser derrière soi. J’en ai fait l’expérience au cours de mes propres études et j’ai vu assez souvent comment des artistes étaient détruits pendant leurs études artistiques. J’ai beaucoup de respect pour les artistes qui se consacrent à l’enseignement. Je l’ai fait en tant que professeur invité, mais faire cela à plein temps pendant des années… respect. J’ai rencontré il y a peu un professeur de la HEAD qui m’a dit qu’il était en fait l’étudiant et que les étudiants étaient ses professeurs. C’est sans doute la bonne attitude à adopter.
Vous disiez qu’après cette exposition à Baton Gallery, vous vouliez faire une pause. Est-il important, dans la vie d’un artiste, de ne pas produire et de rester parfois loin de son atelier ?
Je ne ferai pas d’exposition en 2025, mais je vais continuer à aller à l’atelier pour peindre. Je ne considère pas ma pratique d’atelier ou mes expositions comme du travail. Le travail, ce sont les deadlines. C’est un peu métaphorique, mais je vous laisse méditer là-dessus.
Quel serait le lieu où vous rêveriez d’exposer ?
La Kunsthalle de Bielefeld dessinée par Philip Johnson. En termes d’architecture, c’est l’une de mes institutions préférées.
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Yann Abrecht & Pol Le Vaillant
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Alexia Maggioni
Balthazar Lovay fonde la galerie Lovay Fine Arts à Genève en 2022.
Balthazar Lovay fonde la galerie Lovay Fine Arts à Genève en 2022. Il nous raconte ici son parcours et comment il a vu la scène genevoise et le Quartier des Bains évoluer.
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Balthazar Lovay fonde la galerie Lovay Fine Arts à Genève en 2022. Il nous raconte ici son parcours et comment il a vu la scène genevoise et le Quartier des Bains évoluer.
Vous avez commencé votre carrière comme artiste, avant de devenir curateur et enfin galeriste. Pourquoi être passé de l’institution au marché?
Pour moi, c’est un parcours logique. Lorsque je dirigeais le centre d’art Fri Art à Fribourg, je passais six mois, voire parfois un an, à travailler avec un artiste. Et cette relation magnifique s’arrêtait une fois l’exposition terminée. J’avais envie de prolonger ce rapport en travaillant pour représenter sur le long terme les artistes qui me semblent importants. Et puis à un niveau plus personnel, galeriste me permettait de trouver une forme d’autonomie aussi bien financière que professionnelle.
Mais avec une prise de risque beaucoup plus grande, non?
Certes, mais un risque plus ou moins mesuré, même s’il faut être vraiment casse-cou pour faire ce métier. Lorsqu’on démarre de rien, on prend conscience de chaque franc investi et reçu. Cette position mobilise énormément, entre d’un bout de la chaîne les artistes et de l’autre le public et les collectionneurs. Le travail entrepreneurial, invisible aux yeux des visiteurs, est énorme. C’est à la fois très excitant et très intense.
Ouvrir à Genève a toujours été dans vos plans?
Disons que ma vie se trouve ici et que je connais les gens. C’est une manière de démarrer. Mais rien n’est jamais gravé dans le marbre.
Comment définiriez-vous votre ligne?
Chercher à avoir le plus fort impact possible pour les artistes que je représente et les soutenir dans leur carrière sur le long terme. Et que cet impact se répercute sur mes clients et mes collectionneurs, afin de pouvoir leur dire que les artistes qu’ils achètent chez moi ne se retrouvent pas seulement sur des murs comme objets décoratifs, mais aussi dans des musées et des livres d’art. Je défends des artistes que l’on ne retrouve pas encore dans d’autres galeries et qui sont des exclusivités.
Je pense à Lucia di Luciano, ou Suzanne Santoro (sujet de notre exposition de janvier 2025), à la longue carrière, mais qui sont des découvertes historiques, et dont les travaux n’ont pas eu la visibilité nécessaire à un moment donné. Mais aussi à Pascal Vonlanthen, un artiste qui aurait été classé dans l’Art brut, une catégorisation que je trouve peu fertile, et qui a toute sa voix dans l’art contemporain.
Je me positionne comme la galerie qui représente officiellement ces artistes à l’international, depuis Genève, en dévoilant leurs corpus peu connus. Alors oui, j’ai aussi monté une exposition de John Armleder, mais en présentant des œuvres de jeunesse qui n’avaient pratiquement jamais été montrées.
Représentez-vous également des artistes plus jeunes?
Je présente en effet Marie Gyger une jeune artiste suisse, ainsi que Michèle Graf et Selina Grüter, un duo zurichois qui vit à New York depuis six ans. En général, ce sont des artistes qui cherchent une forme d’innovation par rapport à l’histoire de l’art et qui engagent une réflexion profonde sur l’art et notre temps. J’ai présenté Graf et Grüter à Liste 2024. Elles ont participé à la 15e Baltic Triennale et présentent en ce moment une exposition importante à la Halle für Kunst de Lüneburg en Allemagne.
Vous avez ouvert Lovay Fine Arts dans le Quartier des Bains en septembre 2022. Comment avez-vous vu le quartier se développer?
En fait, je suis arrivé trois fois dans le quartier. La première, c’était en 2001. À l’époque, j’étais l’assistant de Lionel Bovier qui venait de lancer JRP Éditions, d’abord dans un garage des Pâquis et enfin dans une arcade de la rue des Bains. J’y suis ensuite revenu de 2004 à 2012 avec Fabrice Stroun lorsque nous avons créé Hard Hat qui était un éditeur de multiples et une galerie d’exposition pour de jeunes artistes. Et me revoilà, 10 ans plus tard. Alors oui, l’ambiance a beaucoup changé.
En 2005, les vernissages du Quartier des Bains réunissaient environ 2000 personnes. Il y avait beaucoup plus de galeries et la dynamique entre le marché de l’art, les institutions et la scène locale alternative étaient bien plus imbriquées. Surtout, le Quartier des Bains bénéficiait d’un important sponsor qui permettait le fameux prix des drapeaux qui prenaient la forme de bannières d’artistes accrochées dans tout le quartier et jusque sur le pont du Mont-Blanc. Cela créait un fort appel d’air médiatique et populaire!
Vingt ans plus tard, à Genève, il y a beaucoup de très bons restaurants chers et moins de créativité dans le milieu de l’art. À nous d’y remédier!
Comment voyez-vous son évolution ces prochaines années?
Aujourd’hui, les galeries genevoises sont dispersées dans la ville. Je pense qu’il faudra repenser la notion de Quartier des Bains et revoir la dynamique entre tous les quartiers dans lesquels il y a des galeries.
La rénovation du MAMCO, du Centre d’art contemporain et du Centre de la photographie doit être vue comme une opportunité. Ces trois lieux vont migrer de quartiers à d’autres de manière ponctuelle dans le courant des cinq prochaines années. Ce sera l’occasion de relancer une nouvelle dynamique de l’art dans la ville. Mais aussi de repenser la relation entre les galeries et les musées, les galeries et les artistes.
Quant à remettre Genève sur la carte internationale du marché, il nous manque des galeries locomotives pour engager ce mouvement, une ou deux galeries genevoises qui prendraient des envergures internationales.
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Emmanuel Grandjean
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